Ce qu’il en reste ...
Au cours de l’année 1942 l’armée allemande commence l’installation d’une usine destinée à pourvoir en galets les constructions en béton du mur de l’Atlantique. La matière première était extraite d’un cordon littoral qui s’étendait sur environ 12 kilomètres, avait 100 mètres dans sa plus grande largeur et dépassait souvent 5 mètres de hauteur. Cette digue naturelle, quoique très entamée, existe encore. Elle s’appelle l’Ero Vili, du breton ero, chaussée, et vili, galets. Des wagonnets, roulant sur des rails posés à même la crête de l’Ero Vili, étaient chargés et remorqués vers une grande casemate qui leur servait de rampe pour basculer leur contenu dans des wagons-tombereaux par l’intermédiaire de trémies. Une ligne de chemin de fer spéciale fut construite pour relier cet endroit à Pont-L’Abbé et rejoindre le circuit ferroviaire national. Durant trois ans, le chantier travaille jour et nuit, emploie plus de quatre cents ouvriers, une cinquantaine de soldats, et expédie quotidiennement de six à dix convois de galets dont certains comportent jusqu’à cent wagons. On estime à 1 million de tonnes le matériau charroyé. Il est utilisé pour la construction des bases sous-marines et des blockhaus de la plus grande partie du système défensif allemand sur les côtes françaises. Le maréchal Rommel vint visiter les installations au début de l’année 1944.
Les galets sont acheminés en wagonnets jusqu’au concasseur, puis triés par trémies, séparant les petits utilisables tels quels des plus gros destinés au concassage. Ils sont ensuite acheminés en train jusqu’à Pont-l’Abbé, puis envoyés au quatre coins du Finistère. C’est un véritable pillage des ressources naturelles auquel s’adonnent alors les Allemands, le cordon ayant déjà été reconnu fragile et inexploitable sur la commune de Plovan en 1934. L’extraction produit 50 mètres cubes par mètre de cordon dunaire, qui n’affiche plus que 30 m de largeur à certains endroits.
A la Libération, le stock de galets acheminés vers l’usine laissé par les Allemands pose question. Au vu des besoins de la reconstruction, notamment celle de la ville de Brest et de ses artifices portuaires, il est décidé de remettre en fonctionnement le concasseur, jusqu’à épuisement du stock laissé sur place. L’usine fonctionne donc à plein temps de mai 1946 à fin 1947. C’est le service maritime qui met le holà à l’exploitation à la fin du stock, affirmant qu’un affaiblissement supplémentaire du cordon rendrait inondables les zones riveraines. L’usine est donc démantelée. Mais les grandes marées de 1948 abîment énormément le cordon dunaire affaibli sur 2 km, entre l’usine et l’étang de Trunvel.
L’Ero Vili s’est formé il y a environ 5 000 ans. On pensait qu’il colmaterait de lui-même ses brèches. On se rend compte désormais qu’il est très vulnérable. Il n’est hélas pas rare de voir des gens "cueillir" des sacs entiers de galets pour aménager leur jardin malgré les écriteaux explicites sur la fragilité du cordon.
http://fr.wikipedia.org/wiki/Usine_de_concassage_de_galets_de_Tr%C3%A9guennec